La dissolution des souvenirs

La dissolution des souvenirs est le processus physico-chimique par lequel un soluté incorporé dans un solvant forme un mélange homogène appelé solution. Ce qu’il faut donc retenir, c’est qu’après la dissolution arrive toujours une solution.

La dissolution de nos souvenirs est un phénomène incontrôlable.

Nos souvenirs disparaissent de plus en plus, tout au long de notre vie. Autant, sans faire le moindre effort, nous les fabriquons mais sans le vouloir également, ils s’érodent.  Sophie Calle, une artiste française, dévoile son travail dans une exposition temporaire au centre Pompidou de Malaga, jusqu’à fin janvier. Elle a réussi, dans une œuvre, à expliquer exactement la dissolution d’un souvenir (malheureux).

Voici l’histoire : https://centrepompidou-malaga.eu/exposicion/sophie-calle/

L'ancien téléphone rouge.

Tout commence le jour où dans un hôtel de New-Delhi, le téléphone rouge de sa chambre se met à sonner. A l’autre bout du fil, l’homme censé la rejoindre dans quelques jours pour des retrouvailles intensément attendues. Cet amour passionné n’avait pas eu la possibilité de fusionner depuis plusieurs mois et la capitale indienne devenait le décor immensément romantique de leurs retrouvailles.

Le téléphone rouge sonnait. Sophie le décrocha, après le rebond de son corps léger sur le lit défait. À la voix de son amant et en une demi seconde, tout son être se figea… Elle savait qu’elle passait de deux à un. Avec une excuse que seuls les hommes savent inventer, il lui expliqua dans un océan de lâcheté, qu’il ne viendrait pas et qu’il ne viendrait plus jamais. Comme un iceberg qui se détache d’une falaise de glace, tout son être sombra dans l’océan arctique. Alors, elle a pris en photo ce téléphone rouge pour ne jamais oublier cet instant destructeur.

Son travail ensuite a consisté à raconter cette relation et surtout noter le temps nécessaire à cet oubli. Chaque jour, chaque semaine, chaque mois, le récit perdait en détails, les 10 paragraphes du début s’amenuisaient au fur et à mesure qu’elle mangeait les mots. Pour cette auto-théraphie, elle a photographié tous les objets qui lui rappelaient cet amour. Elle a donc imagé sa peine pour que chaque photo enferme le souvenir malheureux. D’une description ultra précise de chaque seconde après le coup de fil du téléphone rouge, elle est passée à une seule phrase : fin de l’histoire. Toutes les photos ont été enfermées dans un tiroir, le tiroir s’est fermé par un tour de clé…

Anciennes photographies dans un musée.

D’une rivière de larmes, Sophie CALLE est passée aux soupirs puis on l’espère, aux sourires. La dissolution des souvenirs

 

Aujourd’hui, ces photos s’exposent pour que l’on comprenne que le temps use les détails, dilue le décor et qu’une simple photo peut tirer à elle toute seule un pan de notre vie. Le temps vaporise nos souvenirs et cela parfume nos vies.

Cette véritable histoire est à l’image de ce que nous vivons tous. En partant d’un souvenir malheureux, on arrive à une finalité plus heureuse car l’oubli a fait son travail. Alors qu’en est-il des souvenirs heureux ? L’érosion est la même, il faut s’inspirer de la leçon de Sophie. Regrouper vos souvenirs heureux en décrivant ou photographiant la scène « déclencheuse » puis y ajouter les détails, les sons, le relief. Ils seront des pépites d’énergies joyeuses lorsque la vie vous jouera le fameux tour de l’oubli.


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Philippe & Peggy
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